Marc 1,40-45
La lèpre existe encore. Michèle Schaefer soigne des lépreux, au Bénin.
Aujourd’hui, la lèpre est facilement guérissable, si elle est prise à temps. A l’époque biblique, non. Dans la Bible la lèpre est tellement grave, qu’elle est associée à la mort. On l’appelle l’antichambre de la mort. Le lépreux ne peut pas assister aux réunions de famille, il ne peut pas aller prier ou travailler avec les autres. Il est socialement mort. Mais pas seulement socialement. La Bible associe la lèpre à des péchés graves d’orgueil ou de médisance. Elle s’est par exemple déclarée sur Myriam, qui était pourtant prophétesse. Myriam s’était opposée au ministère de Moïse et d’Aharon, ses frères. La lèpre s’est aussi déclarée subitement sur Ozias, un roi qui voulait offrir l’encens dans le temple, fonction sacrée réservée aux prêtres. Il est mort lépreux. Tout cela fait que, lorsque l’on voyait un lépreux, on avait la sensation d’avoir affaire à la mort. Ce n’était pas du tout une maladie qu’un médecin pouvait traiter, comme aujourd’hui. Seul Dieu peut purifier un lépreux, car Lui seul peut ressusciter un mort.
Il y a encore une chose qu’il faut bien noter, concernant la lèpre, c’est le mot qui est employé dans la Bible pour « guérir » la lèpre : elle dit « purifier » la lèpre, rendre pur le lépreux.
Ce n’est donc pas une petite chose que ce lépreux demande à Jésus : « si tu le veux, tu peux me rendre pur ». Nous sommes tout au commencement du ministère de Jésus, et déjà la mort de l’être humain lui est lancée en pleine figure. « Si tu le veux, tu peux me rendre pur ». Quelle foi chez ce lépreux ! Quelle volonté farouche, qui l’a poussé à se jeter aux pieds de Jésus, envers et contre tout ! Et il crie vers Jésus : « si tu le veux, tu peux me rendre pur ! » Est-ce que ce cri restera sans réponse ? Jésus peut, Dieu peut tout, il fait tout ce qu’il veut. Mais Dieu le veut-il ? Veut-il que ce lépreux soit purifié de sa lèpre ? Souvent nous nous disons : « si Dieu le veut, il le guérira… » Que répond Jésus ? Va-t-il vouloir rendre pur ?
Avant d’écouter la réponse de Jésus, lisons encore bien le texte. Il y a deux sortes de manuscrits pour le verset 41. Les uns ont : « irrité », les autres ont : « ému de compassion ». Jésus est pris aux entrailles par cette demande, par ce cri qui le touche. Il est bouleversé, il est remué au plus profond de lui-même. Il est surpris par cette mort qui surgit là, devant lui. Il est profondément touché dans son humanité. Nous savons qu’il est Dieu, Fils de Dieu. Mais c’est par son humanité qu’il doit nous sauver, par sa chair et son sang. Est-ce déjà l’heure pour lui d’affronter la mort ? Il vient à peine de commencer son ministère ! N’oublions pas que nous sommes tout au début de l’évangile de Marc. Est-ce déjà le moment pour Jésus d’entrer dans l’impureté humaine, de la toucher, de s’en revêtir ? Quand ce sera l’heure fixée par son Père, Jésus mourra comme un lépreux : rejeté hors de la ville de Jérusalem, à Golgotha. Mais cette heure n’est pas encore arrivée. Elle arrivera dans deux ans et demi, trois ans. Et voilà cette demande qui lui est adressée : « si tu le veux, tu peux me rendre pur ». Une résurrection lui est demandée. Jésus sait qu’il mourra pour sauver l’humanité, mais, je le répète, le Fils de Dieu nous sauve par son humanité. Et la mort bouleverse l’être humain, elle bouleverse l’humanité. Jésus est donc submergé par toutes sortes d’émotions incontrôlables, comme nous, devant la mort : irritation devant cette puissance incontournable, mais aussi compassion, profonde tendresse pour ceux qui passent par la mort.
Etendant la main, il le toucha et lui dit : « je le veux, sois purifié ». Dieu le veut. Dieu veut que tous les êtres humains soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité. Il veut que tous reçoivent la vie, même les fœtus qui, en France, sont tués en grand nombre dans le ventre maternel, même les malades en phase terminale ou les handicapés. Jusqu’au bout il veut la vie. Et devant la mort, il veut encore la vie pour l’être humain. Jésus dit à Marthe, qui est en deuil de son frère : « celui qui croit en moi vivra, quand bien même il serait mort ; et quiconque vit et croit en moi ne mourra pas à jamais. Crois-tu cela ? » Jn 11.25.
Jésus touche donc le lépreux. Toutes nos blessures attendent celui qui viendra les toucher avec les siennes. Tout ce qui nous fait mal attend une guérison. Nous sommes comme des plaies qui attendent le baume, l’huile du Guérisseur, l’huile de Jésus, qui est l’Esprit saint, Son Esprit. Notre impureté attend la pureté de Jésus. Notre impureté est la porte d’entrée de sa pureté. Un pasteur a dit : le péché est la porte par laquelle entre la grâce.
Jésus dit au lépreux purifié d’aller se montrer au temple, pour que les prêtres aient un témoignage. Pour qu’ils fassent ce qu’ils ont à faire pour lui. Car la loi de Dieu ordonne un tas de choses que les prêtres doivent faire pour un lépreux purifié. Ecoutons cette loi Lév 14.1-20 :
1Le Seigneur dit à Moïse :
2« Voici comment se déroule la cérémonie de purification d’un lépreux : lorsqu’on le présente au prêtre,
3celui-ci sort du camp pour l’examiner. S’il est guéri de sa lèpre,
4le prêtre ordonne qu’on apporte pour lui deux oiseaux vivants et purs, du bois de cèdre, de la laine de couleur écarlate et une branche d’hysope.
5Il fait égorger l’un des oiseaux au-dessus d’un récipient en terre contenant de l’eau de source.
6Il prend l’autre oiseau et le plonge, avec le bois de cèdre, la laine écarlate et la branche d’hysope, dans le sang de l’oiseau qu’on a égorgé ;
7il fait alors sept aspersions sur celui qui se purifie de la lèpre. Il le déclare pur, puis il laisse l’oiseau vivant s’envoler vers la pleine campagne.
8Celui qui se purifie lave ses vêtements, rase tous ses poils et se lave avec de l’eau : alors il est pur. Il regagne le camp, mais demeure hors de sa tente pendant une semaine.
9Le septième jour, il rase de nouveau ses cheveux, sa barbe, ses sourcils et tous ses autres poils, puis il lave ses vêtements et se lave dans l’eau. Alors il est purifié.
10Le huitième jour, il prend deux agneaux sans défaut, une brebis d’un an, sans défaut, une offrande de neuf kilos de farine pétrie avec de l’huile, et un demi-litre d’huile.
11Le prêtre qui préside la cérémonie place l’homme, avec ses présents, devant le Seigneur, à l’entrée de la tente de la rencontre.
12Il prend celui des agneaux qui est destiné à un sacrifice de réparation, de même que le demi-litre d’huile, et il les présente au Seigneur avec le geste rituel.
13Il égorge l’agneau à l’endroit où l’on égorge un animal offert en sacrifice pour obtenir le pardon ou en sacrifice complet, c’est-à-dire dans un endroit réservé ; en effet, le sacrifice de réparation, comme le sacrifice pour obtenir le pardon, est une offrande strictement réservée et qui revient au prêtre.
14Le prêtre prend du sang de l’animal et en dépose sur le lobe de l’oreille droite de celui qui se purifie, ainsi que sur le pouce de sa main droite et sur le gros orteil de son pied droit.
15Il prend l’huile et en verse dans sa main gauche :
16il y trempe son index droit et fait sept aspersions devant le Seigneur ;
17puis il en dépose un peu sur le lobe de l’oreille droite de celui qui se purifie, ainsi que sur le pouce de sa main droite et sur le gros orteil de son pied droit, là où il a déjà déposé du sang du sacrifice de réparation.
18Il verse l’huile qui reste dans sa main sur la tête de celui qui se purifie et effectue sur lui le geste rituel de la purification, devant le Seigneur.
19Le prêtre offre le sacrifice pour obtenir le pardon et il effectue de nouveau sur la personne le geste qui la libère de son impureté. Après quoi il égorge l’animal destiné au sacrifice complet
20et le brûle en entier sur l’autel avec l’offrande de farine. Alors, une dernière fois, il effectue sur la personne qui se purifie le geste rituel qui la rend pure.
On dit souvent que Jésus outrepasse la Loi de Dieu. C’est vrai : en touchant le lépreux, il outrepasse la loi de Dieu. La loi ne permet pas de toucher un lépreux. Mais vous remarquerez qu’aussitôt après l’avoir purifié, Jésus ordonne au lépreux d’agir selon la loi, d’aller au temple pour que les prêtres aient un témoignage et qu’ils accomplissent sur lui le rituel de purification de la loi. Dieu, qui a donné la Loi, vient Lui-même se donner à nous à travers la Loi. Car la Loi de Dieu est fondamentalement une loi de vie. Quand la Loi conduit à la mort, c’est pour nous ressusciter dans le Fils éternel de Dieu, dans ce Fils par lequel Dieu a rejoint notre humanité.
La loi a prévu pour les lépreux purifiés tout un rituel. Vous l’avez entendu : c’est un rituel très riche de significations. Je vous ai dit que dans la Bible, la lèpre n’est comparable à aucune autre maladie. Mais dans la Bible, la purification d’un lépreux n’est comparable à aucune autre guérison. Pour aucune autre guérison il n’y a un rituel si riche, à accomplir en présence de Dieu dans le temple. Le lépreux purifié doit se raser complètement. Il est comme un nouveau-né, sans poils, ni cheveux. Il doit se baigner comme un noveau-né. Il reçoit de la part du prêtre du sang sur l’oreille, la main, le pied, et par-dessus le sang, l’huile, le symbole de l’Esprit Saint qui gère maintenant tous ses sens, ses actes, sa marche avec Dieu. Il est pur, entièrement pur, capable d’officier en présence de Dieu comme un prêtre. Car le rituel de purification d’un lépreux ressemble au rituel de l’ordination d’un prêtre. Quelle est la fonction principale d’un prêtre ? C’est celle de transmettre la Parole du Dieu vivant. C’est exactement ce que fait maintenant le lépreux : « il divulgue beaucoup la Parole » v.45. Il fait la même chose que Jésus Marc 2.3.
Ce lépreux, qui avait pratiqué auparavant la médisance, annonce maintenant à tous la Parole du Dieu vivant qui fait vivre. A tel point que Jésus est obligé de se retirer dans les lieux déserts.
Et les foules viennent de toute part le rejoindre là où il est. Plus Jésus se cache loin de nous, plus nous sommes attirés vers lui. Jésus est allé se cacher dans le sein du Père d’où il a été envoyé. Et c’est maintenant par la force du Saint-Esprit qu’il attire à Lui des personnes du monde entier. Le Saint-Esprit agit, on ne sait comment, mais il agit. Où tout cela va-t-il nous mener ? C’est encore le Saint-Esprit qui le sait.
Une chose est sûre : ce lépreux purifié, est maintenant plus proche de Jésus qu’il ne l’a jamais été. Amen.