• le 2 juin 2024

QUI DITES-VOUS QUE JE SUIS ?

Alain NADAL

Mt 16,13-17,9

Comme nous l’avons vu, le récit de la transfiguration de Jésus, qui termine la lecture que je viens de faire, se place après plusieurs épisodes bien connus de la vie de Jésus : 1) Le moment où Pierre reçoit la révélation que Jésus est le Messie. (Il faut savoir que le Messie était attendu depuis longtemps en Israël) ; 2) La mission que Jésus annonce à Pierre : « Je te dis que tu es Pierre, et que sur ce rocher je construirai mon Église » ; 3) l’annonce de Jésus qu’il allait être crucifié, et qu’il ressusciterait ; 4) L’incompréhension de Pierre qui s’attire la remontrance de Jésus : « Arrière de moi, Satan ! » ( Mt 16,23)

  Le 2 autres évangiles synoptiques ( Marc et Luc) relatent aussi ces 3 épisodes, ce qui prouve l’importance qu’ils leur accordent. Et de plus, ils les placent dans le même ordre.   

   Le récit de la transfiguration est énigmatique à plus d’un titre : En effet, le changement d’apparence du visage de Jésus qui « resplendit comme le soleil », ses vêtements qui « devinrent blancs comme la lumière » ne sont pas des choses courantes. L’apparition de Moïse et d’Élie qui s’entretiennent avec Jésus alors qu’ils sont morts depuis des siècles, la nuée lumineuse dans laquelle ils disparaissent subitement et de laquelle Dieu fait entendre sa voix, comme au moment du baptême de son Fils : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé qui a toute mon approbation : écoutez-le ! », toutes ces péripéties sont troublantes pour les croyants que nous sommes, et nous ne savons pas quoi en penser. 

   Alors, que peut nous apporter ce texte, et ceux qui précèdent, pour grandir dans le connaissance de Jésus, dans la foi et dans la confiance en lui ? C’est à cette question que je vais m’efforcer de répondre.

 Souvenez-vous : Avant que Pierre reçoive la révélation que Jésus est le Christ, Jésus avait demandé à ses disciples : « Qui suis-je, d’après les hommes, moi le Fils de l’homme ? ». Les réponses sont variées : « Les uns disent que tu es Jean-Baptiste ; les autres, Élie ; les autres, Jérémie ou l’un des prophètes » (Mt 16,13). 

   Toutes ces personnes avaient certainement entendu parler de Jésus. Certaines l’avaient peut-être vu, entendu prêcher, l’avaient vu guérir des malades et accomplir des miracles, ressuscité des morts… et pourtant, chacune avait son idée. Aucune n’avait compris qu’il était le Messie attendu depuis plusieurs siècles, et dont les prophètes avaient annoncé la venue (Es 53).

   Lorsque Jésus pose la même question à ses disciples, seul Pierre donne une réponse : « Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant » Et que lui dit Jésus ? : « Tu es heureux, Simon, fils de Jonas, car ce ne sont pas la chair et le sang qui t’ont révélé cela, mais c’est mon Père qui est dans les cieux » (Mt 16, 17).

   On pourrait se dire : C’est magnifique ! Pierre a tout compris ! Et pourtant, peu de temps après, lorsque Jésus annonce à ses disciples qu’il va être crucifié et qu’il ressuscitera, la réaction de Pierre montre qu’il lui reste beaucoup de chemin à faire pour connaître vraiment qui est Jésus : « Pierre le prit à part et se mit à lui faire des reproches en disant : ‘À Dieu ne plaise, Seigneur ! Cela ne t’arrivera pas’ » (Mt 16,22).

   De quoi Pierre avait-il besoin pour commencer à comprendre qui était vraiment Jésus ? Il avait besoin de voir la gloire de Dieu se manifester sur le visage et sur les vêtements de l’homme qu’il suivait sur les chemins de Galilée et de Judée depuis des mois. Il avait besoin d’entendre la voix de Dieu dire en parlant de Jésus transfiguré : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé : Ecoutez-le ! » (Mt 17,5). Il avait besoin de voir deux géants de l’histoire d’Israël parler avec Jésus : Moïse qui avait reçu la Loi des mains de Dieu sur la montagne du Sinaï,  et Élie, le grand prophète, qui fut enlevé au ciel sans passer par la mort (2 R 1) et dont Dieu a dit, par le prophète Malachie : « Voici, moi-même, je vous enverrai le prophète Élie avant la venue du jour de l’Éternel, jour grand et redoutable » ( = jour du jugement) (Mal 3,23). 

   Le fait que Matthieu nous rapporte que Moïse et Élie s’entretiennent avec Jésus n’est pas anodin : C’est comme un rappel du déroulement du plan de Dieu pour sauver l’humanité, plan qui trouvera son aboutissement en Jésus, en Jésus seulement. Le texte le dit en filigrane : Après que Moïse et Élie aient disparu dans la nuée, les 3 disciples « ne virent plus que Jésus seul » (Mt 17,8). Encore une fois, ce n’est pas un détail : C’est une façon de dire que c’est seulement en Jésus que l’histoire du salut s’accomplit.

  C’est pour faire comprendre cela aux 3 disciples, que Jésus le a pris à part et les  a conduits sur la montagne :  pour commencer à leur révéler qui il est vraiment.

   Pourquoi ai-je préciser deux fois « commencer à comprendre », ou « commencer à leur révéler… » ?

   Pierre, Jacques et Jean, après l’expérience qu’ils avait vécue sur la montagne, ne connaissaient pas encore vraiment qui était Jésus ? Le fait qu’ils aient vu la gloire de Dieu se manifester sur son visage n’était-il pas suffisant ? La réponse peut paraître surprenante, mais c’est : NON !

   C’est le v. 9 qui nous permet d’affirmer cela : « Comme ils descendaient de la montagne, Jésus leur donna cet ordre : Ne parlez à personne de ce que vous avez vu, jusqu’à ce que le Fils de l’homme soit ressuscité».

   Quel est le sens de cette interdiction ? Est-ce une cachotterie de la part de Jésus ? Non, bien sûr ! Jésus sait qu’il leur manque encore une chose essentielle pour comprendre qui il est : Être remplis du Saint-Esprit. 

   Il ne voulait donc pas que ces 3 disciples témoignent aux autres hommes d’un Messie qu’ils comprenaient sans le secours du Saint-Esprit. En effet, si Pierre, après avoir dit à Jésus qu’il était le Messie, avait été éclairé par le Saint-Esprit, il ne lui aurait pas fait de reproches quand Jésus annonça qu’il allait être crucifié. S’il l’a fait, c’est que pour lui, il était impossible que le Messie, le Fils de Dieu meurt, car sa vision du Messie, c’est qu’il allait débarrasser Israël du joug des occupants romains. Pierre avait une vision humaine du Messie, car il ne le comprenait qu’avec sa nature humaine.

   Nous avons 2 autres preuves que sa compréhension et celle des autres disciples était partielle : 

   1) Lorsque, après sa résurrection, Jésus se présente à eux, Ils tremblent de peur car ils croient voir un esprit. Jésus est obligé de leur dire : « Voyez mes mains et mes pieds, c’est bien moi ; touchez-moi et voyez ; un esprit n’a ni chair ni os comme vous voyez que j’en ai » (Lc 24,39). Et pour leur donner une nouvelle preuve, il mange un morceau de poisson grillé ! (v. 42). 

   2) Le jour-même de la résurrection, Pierre et le disciple que Jésus aimait (c’est-à-dire Jean) courent au tombeau pour vérifier que le corps de Jésus n’y était plus, comme Marie-Madeleine venait de leur dire. Lorsqu’ils arrivent, ils constatent que le tombeau est vide. Pierre entre le premier dans le tombeau, suivi par Jean. Et c’est Jean qui écrit, en parlant de lui-même : « Il vit, et il crut ». Et il ajoute : « Car ils  (au pluriel) n’avaient pas encore compris l’Écriture, selon laquelle Jésus devait ressusciter d’entre les morts » (Jn 20,8-9). Pour rappel, Pierre et Jean étaient avec Jésus sur la montagne.

  Qu’est-ce qui a permis aux disciples de comprendre ce que signifie la résurrection de Jésus ? Il fallait qu’ils soient remplis de l’Esprit-Saint. Jésus le leur dit : « J’enverrai sur vous ce que mon Père a promis, mais vous, restez dans la ville, jusqu’à ce que vous soyez revêtus de la puissance d’en haut » (Lc 24,49). 

   Vous avez compris que Jésus parlait de la Pentecôte. C’est ce jour-là que les disciples ont été remplis de l’Esprit-Saint. C’est à ce moment-là que Pierre a vraiment compris qui était Jésus, car c’est le Saint-Esprit qui lui a fait comprendre.

   Ce jour-là, on voit un Pierre métamorphosé prendre la parole devant une foule considérable, et déclarer : « Ce Jésus, Dieu l’a ressuscité ; nous en sommes tous témoins. Élevé par la droite de Dieu, il a reçu du Père l’Esprit-Saint qui avait été promis et il l’a répandu comme vous le voyez et l’entendez » (Actes 2,32).

   Frères et sœurs, après le débrousaillage des textes que je vous ai lus ce matin, qu’allons-nous en tirer pour notre relation personnelle avec Jésus ? Notre vision de Jésus est-elle identique à celle de Pierre, avant la pentecôte, ou après la Pentecôte ? Est-elle éclairée par notre intelligence propre, ou par notre intelligence soumise à l’Esprit-Saint ?

   Pierre avait prononcé les mots justes en parlant de Jésus : Tu es le Christ, le Fils du Dieu vivant. Mais il avait une vision de Jésus toute humaine.

  Aujourd’hui, nous avons l’avantage sur lui, parce que que Jésus a répandu son Esprit sur tous les hommes, lorsqu’il est monté au ciel après sa résurrection (Act 2,34). Mais l’Esprit-Saint ne peut éclairer notre esprit que si nous nous sommes repentis et avons reconnu Jésus comme Sauveur et Seigneur.

   Les chrétiens parlent beaucoup du Saint-Esprit, mais y sont-ils soumis ? Le cœur de l’homme est tellement tortueux (Jr 17,9) qu’il est capable de croire qu’il vit selon des principes bibliques alors qu’il fait l’inverse de ce que dit la Parole.

   Je connais quelqu’un, (que vous connaissez aussi, puisque c’est celui qui vous parle), qui connaissait par cœur Eph 2,8-9 : « C’est par grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Ce n’est point par les œuvres afin que personne ne se glorifie ». Cet homme, profondément croyant, a pourtant vécu pendant des années en essayant de faire son salut par ses œuvres. Il avait un voile sur les yeux et croyait sincèrement vivre dans la vérité ! Il a fallu qu’un matin, Jésus le prenne à part sur la « montagne » (en l’occurence sa chambre), et lui révèle, pendant qu’il priait, ce qu’est vraiment le salut par grâce.
   Oh, La bonté de Dieu ! qui a supporté cet homme qui était dans l’erreur, qui a continué à l’aimer malgré son erreur, et qui a décidé, par pure grâce, de lui révéler la Vérité, sans le condamner ! Cet homme n’oubliera jamais ce matin-là, où la Lumière divine, la seule qui pouvait le faire, est venue éclairer son esprit.

   Frères et sœurs, soyons réceptifs aux appels du Seigneur lorsqu’il nous invite à monter, avec lui, sur la « montagne ». Ne remettons pas au lendemain le temps du rendez-vous cœur à cœur auquel il nous invite chaque jour. Demandons-lui sincèrement de nous remplir du Saint-Esprit, qui seul peut nous remettre sur le bon chemin et nous faire connaître qui est vraiment Jésus. Le Saint-Esprit veut nous accorder cette révélation, tout simplement parce qu’il nous aime, qu’il veut le meilleur pour nous, et parce qu’il sait que « la vérité nous rendra libre » (Jn 8,32).

   Que répondrions-nous, si Jésus nous demandait : Qui dit-tu que je suis ?

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