Jean 16,1-15
Le texte de ce matin fait partie des derniers entretiens de Jésus avec ses disciples, avant son arrestation. Ses paroles prennent donc un caractère particulièrement solennel. Au v. 5, il leur annonce qu’il va les quitter pour remonter vers son Père. Et il constate que la tristesse a rempli leur cœur. On peut les comprendre : après trois ans passés chaque jour avec Jésus, à être enseignés, à le voir prêcher, à être les témoins de ses guérisons et de ses miracles, la perspective de se retrouver seuls n’est par réjouissante. C’est bien la raison pour laquelle Jésus leur dit : « Il est avantageux pour vous que je m’en aille, car si je ne pars pas, le Consolateur ne viendra pas vers vous ; mais si je m’en vais, je vous l’enverrai » (v.7). Jésus sait très bien que ses disciples ne peuvent pas comprendre ce qu’il leur dit ici. Mais il le leur dit quand même, pour que, le moment venu, ils se souviennent de ce qu’il leur a dit (v.4).
Pourquoi était-il important que les disciples reçoivent le Saint-Esprit après que Jésus sois parti ? C’est à cette question que la suite de notre texte va nous permettre de répondre.
Si le Nouveau Testament s’était limité aux 3 premiers évangiles (les évangiles synoptiques), la révélation de Dieu concernant les salut des hommes aurait été incomplète. En effet, pendant les 3 années au cours desquelles il a formé ses disciples, Jésus leur a seulement annoncé que des chefs religieux le condamneraient à mort, qu’il mourrait et qu’il ressusciterait (3 fois chez Matthieu, 3 fois chez Marc et 3 fois chez Luc). Mais, à l’exception d’une allusion dans l’évangile de marc (10,45), Jésus n’a jamais parlé du SENS de sa mort et de sa résurrection. Même discrétion dans l’évangile de Jean où Jésus dit seulement qu’il est « le bon berger qui donne sa vie pour ses brebis » (10,11 et 28). Sur ce point important, l’enseignement de Jésus a été très succinct.
De même, des thèmes importants pour notre foi, comme le fait qu’un jour les Juifs reconnaîtront Jésus comme le Messie, ou bien le plan de salut pour les païens, les rapports entre la grâce et la loi, ou la destinée de l’église des derniers temps, les Évangiles n’en parlent pas. C’est Paul et quelques apôtres (Pierre, Jean et Jacques) qui en parlent dans les épitres et l’apocalypse. C’est à dire : après la venue de l’Esprit, à Pentecôte.
Pourquoi Jésus n’a-t-il pas tout dit à ses disciples pendant qu’il était physiquement présent avec eux ?
Parce qu’il savait que sans l’onction de l’Esprit-Saint, ses disciples étaient dans l’incapacité spirituelle de comprendre certaines choses. Jésus le dit clairement au v. 12 : « J’ai encore beaucoup de choses à vous dire, mais vous ne pouvez pas les comprendre maintenant ». Et pour montrer l’importance de l’action de l’Esprit dans la compréhension des choses spirituelles, il ajoute tout de suite après : « Quand il sera venu, lui, l’Esprit de Vérité, il vous conduira dans toute la vérité » (v. 13).
On voit bien, en lisant les évangiles puis les épitres, que c’est ce qui s’est effectivement passé. Pour ne prendre qu’un exemple significatif je citerai le moment où Jésus annonce sa mort et sa résurrection à ses disciples. Le texte nous dit « Mais les disciples ne comprenaient pas cette parole » (Mc 9,32). Luc va même plus loin : Après que Jésus leur ait annoncé sa mort, le texte dit : « Les disciples ne comprenaient pas cette déclaration : elle était voilée pour eux, afin qu’ils n’en saisissent pas le sens » (Lc 9,45).
Mais tout a changé après la venue de l’Esprit. Jean, qui lui non plus n’avait rien compris lorsqu’il avait entendu Jésus parler de sa mort et de sa résurrection, écrivit dans son épître, après la Pentecôte : « Mes petits enfants, je vous écris ceci, afin que vous ne péchiez pas. Et si quelqu’un a péché, nous avons un avocat auprès du Père, Jésus-Christ le juste. Il est lui-même victime expiatoire pour nos péchés, non seulement pour les nôtres, mais aussi pour ceux du mode entier » (1Jn 2,1-2).
Le Saint-Esprit avait fait son œuvre en lui ! Tout devenait clair pour lui. Aujourd’hui, ce même Saint-Esprit veut faire la même œuvre en nous tous, pour que nous ayons la pleine révélation de l’œuvre de Christ pour nos vies et pour ceux qui nous entourent.
Pourquoi le Saint-Esprit permet-il aux disciples et aux croyants de tous les temps de mieux entrer dans la révélation, c’est-à-dire, de mieux connaître Jésus et les plans de Dieu ?
Le seconde partie du v. 13 apporte la réponse : « Quand il sera venu, lui, l’Esprit de vérité, il vous guidera dans toute la vérité ; car ses paroles (les paroles de l’Esprit) ne viendront pas de lui-même, mais il parlera de tout ce qu’il aura entendu et vous annoncera les choses à venir ».
Pour bien comprendre ce que dit Jésus, il faut ajouter quelques mots à cette phrase : « Le Saint-Esprit parlera de tout ce qu’il aura entendu dire par le Père à mon sujet, et vous annoncera les choses à venir ». Ceci est très important : c’est le Père lui-même, par l’intermédiaire de l’Esprit, qui enseignera les disciples au sujet de Jésus et de son œuvre, et de la fin des temps (les choses à venir).
C’est exactement ce qui s’est passé : Inspirés par l’Esprit, les auteurs des épîtres et de l’apocalypse ont non seulement pu connaître Jésus et son œuvre d’une façon beaucoup plus profonde après la venue de l’Esprit, mais ils ont aussi été ceux qui ont complété la révélation voulue par Dieu. L’apocalypse, qui parle de la destinée de l’Église dans les derniers temps, est l’exemple même de la révélation faite à Jean par l’Esprit-Saint : « Révélation de Jésus-Christ, que Dieu… a fait connaître par l’envoie de son ange à son serviteur Jean… » (Ap1,1).
La reconnaissance par les Juifs de Jésus comme messie est un autre exemple de la révélation faite par l’Esprit à Paul (lire Rm 11). De même, l’annonce du salut pour les païens au même titre que pour les Juifs est une révélation de l’Esprit. Paul écrit à ce propos : « Ce mystère n’avait pas été porté à la connaissance des fils de l’homme dans les autres générations, comme il a été révélé maintenantpar l’Esprit à ses saints apôtres et prophètes » (Eph 3,5). Maintenant, c’est-à-dire après que l’Esprit ait été répandu.
Dans ce texte, Jésus parle aussi d’une œuvre qui aurait été impossible sans la venue de l’Esprit. Relisons les v. 7 et 8 : « Il est avantageux pour vous que je parte, car si je ne pars pas, le Consolateur ne viendra pas vers vous ; mais si je m’en vais, je vous l’enverrai ». Quel vont être les conséquences de cet envoi ? La suite du verset le précise : « Et quand il sera venu, il convaincra le monde de péché, de justice et de jugement ».
Remarque : Je précise, conformément à ce que Jésus dit aux v. 9-11, que le péché, ici, n’est pas une faute morale, mais le fait de ne pas croire à l’œuvre de Jésus. La justice, ici, n’est pas la justification, mais le fait que Jésus n’a pas usurpé le titre de Fils de Dieu, puisque, après sa mort, il est ressuscité et est remonté vers le Père. Quant au jugement, ce n’est pas celui qui concerne les hommes, mais Satan, dont le sort est scellé, puisqu’il est déjà jugé.
Je parlais à l’instant d’un œuvre impossible sans la venue de l’Esprit. De quoi s’agit-il ? Pour convaincre le monde de péché, de justice et de jugement, Dieu pourrait s’en charger tout seul. Mais ce n’est pas sa façon habituelle de procéder. Si le Saint-Esprit est envoyé sur les disciples de tous les temps, c’est pour que ces derniers, par la prédication, annoncent aux hommes du monde entier la vérité de ces 3 points. On est ici au cœur de la mission de l’Esprit-Saint. Et pour que cette mission s’accomplisse par des disciples, il faut que l’Esprit-Saint agisse en eux. C’est ainsi que Jésus sera glorifié, comme le dit le v. 14 : L’Esprit de Vérité « me glorifiera, parce qu’il prendra de ce qui est à moi et vous l’annoncera ».
En Faisant connaître aux croyants la vérité, en leur dévoilant les attributs de Christ (sa sainteté, sa grandeur, son amour), en leur dévoilant le sens de sa mort et de sa résurrection, le cœur des croyants ne pourra que glorifier le Fils. En effet le Fils ne travaille qu’à glorifier le Père, et l’Esprit ne veut que glorifier le Fils.
Lorsqu’un croyant vit par l’Esprit, lorsqu’il laisse le Saint-Esprit guider sa vie (pensées, paroles et actes), la connaissance de Jésus grandit en lui. L’Écriture devient une nourriture spirituelle dont il ne peut plus se passer, c’est son oxygène spirituel ; le sens de la mort et de la résurrection de Christ prend une signification nouvelle qui va le conduire dans une prière de reconnaissance, de louange et d’adoration spontanée et intense. Mais aussi le motiver pour annoncer aux autres ce que l’Esprit lui a fait connaître de Christ et de son œuvre. Voilà la mission essentielle de chaque disciple ; mission impossible sans l’Esprit.
La fête de Pâques est célébrée, à juste titre, comme un événement majeur dans l’histoire du monde et dans celle de chaque chrétien. Pour beaucoup de croyants elle semble même reléguée la Pentecôte au second rang si on en juge par l’assistance plus faible dans les lieux de culte, ce jour-là. C’est pourtant un événement aussi essentiel que celui de la résurrection de Jésus. Le texte d’aujourd’hui nous en montre toute l’importance.
Mais il nous montre aussi que c’est un événement à vivre, individuellement et en communauté, si nous ne voulons pas en rester à la compréhension limitée qu’avaient les disciples avant la pentecôte. Le plan de Dieu pour chaque croyant, pour chaque communauté, c’est de nous accorder une pleine révélation, comme Jésus le dit au v. 13 : « Quand il sera venu, lui, l’Esprit de vérité, il vous conduira dans toute la vérité ».
Viens, Esprit-Saint, et conduis-moi, conduis-nous dans toute la vérité !