Marc 6 versets 7 à 13
Au verset 7 il nous est dit que Jésus « commença » à envoyer ses disciples deux par deux. Il a commencé en Galilée, il continue aujourd’hui et il continuera jusqu’à sa venue en gloire avec tous ceux qu’il aura envoyés au cours des siècles. Nous sommes élus par l’amour de Dieu avant la fondation du monde nous dit Paul dans la louange qui commence l’épître aux Ephésiens. Dans la Bible, être élu est en rapport avec une mission, un envoi. Pour Jésus lui-même, toute sa vie est un envoi, toute sa vie est une mission à vivre au milieu de nous. Il a été envoyé vers nous. Si nous sommes envoyés par lui, c’est qu’il estime avoir réussi à nous transmettre ce dont il vit.
A la simple lecture de Marc 6, nous pourrions penser que la mission de guérir les malades et de chasser les démons n’a été donné qu’aux douze apôtres. Il n’en est rien, c’est une mission qui concerne tous ceux qui auront cru en Jésus, jusqu’à la fin des temps, comme le Ressuscité le dit à la fin de l’évangile : « voici les signes qui accompagneront ceux qui auront cru : . Ils imposeront les mains à des malades et ceux-ci seront guéris » Mc 16.18.
Pour remplir cette mission, il nous faut vivre de ce dont Jésus vivait. De quoi vit Jésus ? Il vit de deux choses : de la relation avec son Père, de l’aide que lui apportent les êtres humains vers qui il est envoyé.
Pourquoi toutes ces recommandations de Jésus à ses disciples concernant les bagages qu’il faut emporter et les bagages qu’il ne faut pas emporter ? Il y a d’ailleurs plus de choses qu’il ne faut pas emporter que de choses à emporter. A emporter : un bâton et des sandales. A ne pas emporter : pas de vêtement de rechange, pas d’argent, pas de sacs pour faire des provisions. Même les SDF ont des sacs, les disciples de Jésus, non. Pourquoi un bâton ? Le texte ne le dit pas. Le plus évident, c’est que les Hébreux, quand on célébré leur dernier repas dans le pays d’Egypte, ils l’ont célébré un bâton à la main. Ils partaient vers un autre royaume, un autre pays. Personnellement, je n’écarte pas l’idée que le bâton protège des chiens errants. Nous ne sommes pas dans la toute-puissance, quand nous évangélisons. Une morsure de chien peut nous arrêter longtemps. Mais ce qui doit retenir notre attention, c’est que Jésus interdit l’argent et les vêtements de rechange. Cela crée pour les missionnaires une grande dépendance vis-à-vis des personnes qui les accueillent. Mais c’est ainsi que Jésus a vécu parmi nous : il a bien fallu que sa maman lui mette une couche, que Joseph et Marie lui donnent le biberon, il a bien fallu que Joseph gagne le pain pour la famille. Et quand Jésus a commencé son ministère après son baptême, on nous dit que beaucoup de femmes le soutenaient financièrement, et certaines de ces femmes avaient été libérées de démons et guéries de graves maladies Luc 8.2. Sans elles, le ministère de Jésus n’aurait pas été possible, ni sans les autres personnes qui lui ont ouvert leur maison. Aujourd’hui, quand on parle évangélisation, on a en général tout faux depuis le départ, car on pense à l’argent pour financer tout cela. Nous évangélisons le mieux lorsque nous dépendons de ceux à qui nous annonçons l’évangile. Jésus le veut ainsi. Il veut casser notre sentiment de supériorité, l’orgueil qui vient de notre foi comprise trop humainement : nous n’avons aucun mérite à avoir cru en Jésus. Nous l’oublions trop facilement. C’est un don de Dieu. Et dès que nous l’oublions, tous nos efforts d’évangélisation ne servent à rien. Réfléchissons maintenant à une autre condition de l’évangélisation : Jésus envoie ses disciples deux par deux. Pourquoi ? Qohélèth 4.10 explique pourquoi : « si l’un tombe, l’autre le relève ». Aucun de nous n’est infaillible, aucun de nous ne commet jamais de péché. A deux, on s’entraide, on se corrige réciproquement. Une telle attitude de vie a disparu presque complètement aujourd’hui, jusque dans les églises. A tel point qu’un évangéliste a pu écrire : « l’église est la seule armée au monde qui achève ses blessés, au lieu de les soigner ». Il est extrêmement émouvant de lire des histoires de soldats qui risquent leur vie pour sauver un des leurs blessés au front. Le Sadou Sundar Singh, un chrétien de l’Inde au début du XX° siècle, marchait dans l’Himalaya dans un froid glacial. Un autre marcheur l’a dépassé et il l’a perdu de vue. Le Sadou Sundar Singh a trouvé un homme à moitié gelé sur le chemin. Malgré son épuisement, il l’a mis sur son dos et a continué à marcher. Plus loin, ils ont rencontré l’homme qui les avait dépassés. Il était mort gelé. Le Sadou Sundar Singh et son compagnon d’infortune ont survécu. Leurs deux corps l’un sur l’autre et l’effort de marcher les ont réchauffés. Personne ne peut évangéliser seul. Je voudrais revenir sur le fait que Jésus a été envoyé vers nous et qu’il est devenu dépendant de nous. Lui qui guérissait les malades, libérait les démonisés, ressuscitait les morts, purifiait les lépreux, il avait besoin de nous, de nos cinq pains et de nos deux poissons. Mais il n’avait pas besoin que de cela. Il a pris corps dans la Vierge Marie, une fille d’Israël. Il lui fallait recevoir son humanité du peuple juif. Dépendant de la chair du peuple juif, il est la Parole devenue chair, Dieu le Fils devenu être humain. Quand il a versé son sang sur la croix, il l’a versé pour tous ceux qui le crucifiaient : les Romains, les Juifs, toi et moi. Si nous ne buvons pas ce sang, nous ne sommes pas sauvés Jean 6.54. On ne peut exprimer mieux combien les Nations, les Juifs et Jésus sont interdépendants. Aucun ne peut vivre sans l’autre. Nous pouvons refuser de faire partie de Jésus, mais lui n’a pas refusé de faire partie de nous, de recevoir de notre chair sa condition humaine par laquelle il nous sauve.
Nous n’avons pas de pouvoir sur Jésus, mais Il a été en notre pouvoir, puisque nous l’avons crucifié.
Jésus envoie donc ses disciples dans des conditions qui les obligent à être dépendants de ceux qui les accueilleront. A ceux qui les accueilleront, ils doivent apporter la guérison, la libération et la joie de la conversion. C’est pourquoi les disciples sont dépendants aussi de leur relation avec Jésus, pas seulement des gens qui les accueillent. En effet, comment apporter la guérison à des malades, quand on n’est pas médecin, quand on n’a pas de remède médical ? Comment libérer les gens de leurs démons, quand on n’a aucune idée du monde des esprits ? Seule notre relation avec Jésus peut directement nous communiquer ce qu’il faut faire et dire. Cette relation, ça s’appelle dans la Bible, le Saint-Esprit, c’est une personne, une relation vivante entre Dieu le Père, Dieu le Fils et nous. Jésus lui-même était totalement dépendant durant son ministère de la relation qu’il avait avec son Père par le Saint-Esprit. C’est pourquoi il priait beaucoup. C’est dans ce que nous faisons par obéissance à Jésus que nous apprenons en même temps à être dépendant des autres et dépendants de Jésus. Le pouvoir que nous donne Jésus de guérir les malades et de libérer les démonisés, n’est pas un pouvoir en soi, lié à une fonction. C’est ce que croyait Amatsia, le prêtre de Béthel qui a renvoyé le prophète Amos chez lui, croyant qu’il était un prophète professionnel de Jérusalem. Or Amos était un simple paysan, envoyé par le Seigneur pour annoncer sa parole à Israël et le refus d’Amatsia d’écouter le prophète que Dieu avait envoyé lui coûtera la vie. Très souvent nous imaginons encore aujourd’hui que le pouvoir de guérir les malades ou de chasser les démons est réservé à quelques professionnels, qu’il faudrait appeler un spécialiste des exorcismes, ou un chrétien qui a un ministère de guérison. Nous imaginons qu’il s’agit d’un pouvoir lié à une fonction dans le corps de Christ. Mais c’est faux. Nous avons ce même pouvoir, tous les chrétiens l’ont, car ce n’est pas un pouvoir lié à une fonction, c’est un pouvoir lié à une relation : si je suis en relation avec Jésus par le Saint-Esprit, je suis placé dans les mêmes conditions de vie que Jésus lui-même : je suis dépendant de Jésus de la même façon que Jésus est dépendant de son Père, par le Saint-Esprit. Jésus était dépendant de son Père. Cette relation qu’il entretenait précieusement avec son Père lui a donné le pouvoir de faire ce qu’il a fait, tout au long des rencontres qu’il faisait. On pourrait résumer tout cela par une formule paradoxale : évangéliser, c’est exercer un pouvoir divin sans avoir aucun pouvoir. Le fait que nous n’avons aucun pouvoir est souligné par la possibilité qu’un village peut nous refuser. Dans ce cas, il faut simplement secouer la poussière de ses pieds et aller ailleurs. Jésus a été refusé dans certains villages. Pourquoi pas nous ? Cela aussi casse nos fausses représentations du règne de Dieu. Nous l’imaginons comme un règne qui s’impose partout, de façon irrésistible, puisque c’est le règne de Dieu. Or, il peut être refusé, l’amour peut être refusé, et il ne faudra pas s’en étonner. Les êtres humains disent préférer la liberté par-dessus tout, mais ce n’est pas vrai. Ils démontrent bien souvent qu’ils préfèrent de loin leurs esclavages à la liberté proposée par Dieu. Car c’est une vraie liberté que le Règne de Dieu. L’amour de Dieu n’est pas abusif ou possessif. Il attend notre « oui ». Ne pas s’offusquer lorsque l’évangile que nous prêchons de si bon cœur est refusé, c’est ce que Jésus veut nous faire comprendre : ne cherchez pas à comprendre, allez ailleurs. Jésus est paradoxal. Son règne est paradoxal. La Bible nous dit qu’il s’étend au monde entier et en même temps que des villes et des villages peuvent le refuser, peut-être même des Nations. On peut aussi expliquer le refus par le fait que l’évangile fait mal. Il fait mal, comme fait mal une infirmière qui désinfecte une plaie avant d’y mettre une crème adoucissante et apaisante. L’évangile, c’est que Dieu est venu vers nous, il s’est converti à l’être humain et c’est pourquoi l’être humain est invité à venir à Dieu, à se convertir à Jésus-Christ. Une dernière remarque : les disciples n’ont pas créé d’églises. Le texte ne le dit pas. Les églises seront créées après la Pentecôte. Les gens qui se convertissaient, que sont-ils devenus entretemps ? Le texte ne le dit pas. Que cela nous encourage à ne pas évangéliser pour faire grandir notre église. L’évangélisation doit avoir lieu même s’il n’y avait pas d’église, ce qui n’est pas possible, mais je voudrais que nous prêtions attention à cela : l’évangélisation, c’est urgent, Dieu est venu sur terre, il habite désormais sur terre, la Gloire est présente sur Terre, comme l’a annoncé le Psaume 8( (verset 10). Dans quelques mois des êtres humains vont aller sur la lune pour y habiter quelque temps. Miracle de la technologie. Mais il y a un plus grand miracle, un miracle pour lequel Jésus nous envoie vers les gens qui ne vont pas bien, pas bien psychologiquement, pas bien physiquement, pas bien spirituellement : Dieu a marché sur terre, une Gloire est disponible ici sur terre, c’est le Seigneur Jésus. Il ne faut pas tarder à annoncer cela. Amen.