• le 29 septembre 2024

ÊTRE UNE SENTINELLE SPIRITUELLE

Alain NADAL

Ez 3,16-21 Mc 16, 15-16

  Avant de lire le premier texte de ce matin, je veux le placer dans le contexte historique.

   Le prophète Ézéchiel était contemporain du prophète Jérémie. Pendant que Jérémie adressait ses prophéties aux Judéens restés dans le pays, Ezéchiel s’adressait à ceux qui étaient en exil à Babylone, où lui-même avait été exilé, en 597 av. J.-C.

   La mission que Dieu lui confie est très particulière. En effet, bien qu’ayant été déportés, ces gens ne veulent pas reconnaître leur péché, changer d’attitude et revenir à Dieu. C’est Dieu lui-même qui l’annonce à son prophète : « La communauté d’Israël ne voudra pas t’écouter, parce qu’elle ne veut pas m’écouter » (Ez 3,7). Reconnaissez que c’est plutôt décourageant !

   Pour encourager Ézéchiel, Dieu lui accorde une vision où il voit le Seigneur lui donner un livre à manger. Le texte ne parle pas de la teneur de ce livre, mais c’était vraisemblablement les paroles que Dieu demandait à son prophète d’adresser au peuple. Le prophète mange le livre et dit : « Dans ma bouche, il a été doux comme du miel » (Ez 3,3).

   Malgré cette vision encourageante, le prophète ne décolère pas : « Je suis parti, amer et furieux, tandis que le main de l’Éternel agissait sur moi avec puissance. Je suis arrivé à Thel-Abib, (en Babylonie) vers les exilés qui habitaient près du fleuve Kebar, et je me suis assis là où ils s’asseyaient. Je suis resté là durant sept jours, consterné, au milieu d’eux ». (Ez 3,14-15).

   Qu’est-ce qui motive la consternation d’Ézéchiel ? Est-ce la difficulté de la mission  que Dieu lui confie ? On pourrait le comprendre, puisque Dieu lui-même l’avertit que le peuple n’écoutera pas. Alors, il pourrait se demander : À quoi sert de parler au peuple ?

   Il est plus vraisemblable qu’Ézéchiel soit consterné, non pas par la difficulté de sa mission, mais par l’attitude du peuple (celui qui n’a pas encore été exilé, mais qui le sera plus tard) qui est déporté à Babylone et qui continue à rester sourd aux appels réitérés de Dieu, à reconnaître son péché et à revenir à Lui.  Un proverbe proclame : Il n’y a pas pire sourd que celui qui ne veut pas entendre !

Lecture d’Ez 3,16-21

   Dès les premiers mots du texte, Dieu confie à son prophète le rôle de sentinelle : « Fils d’homme, je te donne comme sentinelle à la communauté d’Israël ». À l’époque, la tâche des sentinelles était délicate : Elle consistait à se tenir sur les remparts de la ville, et à avertir les habitants lorsqu’un danger approchait. Si elles manquaient à leur devoir, s’endormaient ou s’intéressaient plus à leurs affaires que de veiller sur la ville, elles mouraient en même temps qu’était détruite la ville qu’elles devaient avertir. 

   Ézéchiel est donc une sentinelle « spirituelle » qui devait avertir le peuple du jugement à venir. Ce jugement, c’était la déportation à Babylone que le prophète Jérémie avait clairement prophétisée (Jr 39,6). Et c’est exactement ce qui est arrivé. (Pour mémoire, il y a eu 4 déportations. C’est au cours de la seconde déportation qu’Ézéchiel fut emmené à Babylone avec une partie du peuple).

En quoi ce texte écrit il y a 26 siècles nous concerne-t-il ? 

   Si les circonstances historiques ne sont pas les mêmes pour nous aujourd’hui, la situation spirituelle est identique : Nous, chrétiens, vivons au milieu d’un peuple qui a complètement écarté Dieu de sa vie. Non seulement écarté, mais qui, souvent, fait le contraire de que que Dieu demande dans sa Parole. Inutile de vous faire un dessin. Vous regardez tous la télévision et écoutez la radio. Nous sommes abreuvés de scandales, de turpitudes dans tous les domaines, de violence, de guerres, de mensonges, de manipulations de toutes sortes. Mammon et Éros règnent en maître. La puissance des réseaux sociaux est souvent au service de la désinformation, de la haine et de l’antisémitisme ; l’intelligence artificielle est de plus en plus au service de la confusion entre le vrai et le faux. Le prophète Ésaïe s’écriait déjà : « Malheur à ceux qui appellent le mal bien et le bien mal » (Es 5,20).     Il y a bien longtemps que les sociétés humaines sont confrontées à cette ambiguïté. On constate que les progrès technologiques semblent être de plus en plus  au service du mal : On peut tuer des hommes à distance, avec un drône et un simple smartphone ; chacun peut créer de fausses images, plus vraies que nature, pour une propagande mensongère, images qui seront diffusées dans le monde entier en quelques secondes ! Et je suis loin d’être exhaustif ! 

  Il y a un instant, je posais la question : En quoi le texte écrit il y a 26 siècles nous concerne-t-il ? 

   Eh bien, il est d’une brûlante actualité. En effet, Dieu n’a pas changé et ne s’est pas tu ! À l’époque d’Ézéchiel, il voulait sauver son peuple, lui épargner la souffrance de la déportation et de la destruction de Jérusalem et de son Temple, et le voir revenir à lui. Pour cela il avait missionné son prophète et lui avait demandé de parler en son nom.

   Aujourd’hui, par la bouche de son Fils, Dieu demande la même chose à ceux qu’il a choisis, c’est-à-dire, à nous chrétiens ; Jésus dit : « Allez dans le monde entier et prêchez la Bonne Nouvelle à toute la création. Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné ». 

  À l’époque d’Ézéchiel, Dieu demandait à son prophète d’exhorter chaque membre du peuple de revenir à Lui, s’il voulait éviter la mort. Aujourd’hui, Jésus demande à chaque chrétien né de nouveau d’annoncer aux hommes la Bonne Nouvelle de Jésus-Christ, la Bonne Nouvelle du salut en Christ, en Christ seul : « C’est par la grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. En effet, cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu » (Éph 3,8).

   Je veux souligner deux points importants qui se trouvent dans le texte d’Ézéchiel : « Fils de l’homme, que ton cœur accepte et que tes oreilles écoutent toutes les paroles que je te dirai. Va trouver les exilés, les membre de ton peuple ! Tu leur parleras et, qu’ils écoutent ou qu’ils n’écoutent pas, tu leur diras : Voici ce que dit le Seigneur, l’Éternel » (Éz 3,10-11)

  Ézéchiel avait besoin d’accepter personnellement le message de Dieu, et d’acquiescer à l’ordre de le proclamer, alors même que Dieu l’avait prévenu qu’il y avait de fortes chances que les hommes ne l’entendent pas.

  Il en est de même pour nous : la Parole de Dieu doit pénétrer profondément dans notre cœur, et se traduire dans un comportement d’obéissance volontaire, pas contrainte, avant de l’annoncer aux autres, pour que nous puissions les aider à comprendre et à appliquer l’Évangile dans leur vie.

   Au cours de l’Histoire, Dieu ne s’est jamais tu, parce que son amour pour ses créatures est le même, et son but n’a pas changé : Réconcilier les hommes avec Lui, par Jésus-Christ, pour qu’ils héritent la vie éternelle, et non l’enfer. L’apôtre Paul a écrit : « Dieu, notre Sauveur, veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité » (1 Tm 2,4).

   À ce propos, frères et sœurs qui êtes là ce matin, qui vous a parlé de Jésus et a  contribué à vous amener à Christ ? Est-ce votre père, votre mère ? Un moniteur de l’école biblique ? Un voisin ? Un ami ? Un pasteur, un prêtre ? Un évangéliste ? Quelqu’un que vous ne connaissiez pas et que vous n’avez jamais revu ? Je vous laisse quelques secondes pour rassembler vos souvenirs.

   Réfléchissez : Où en seriez-vous, aujourd’hui, si ces personnes qui ont allumé  en vous l’étincelle de la foi s’étaient tues ? Si l’Esprit-Saint ne les avait pas conduites vers vous ?

   Si nous considérons aujourd’hui que le plus beau cadeau que Dieu puisse faire à un homme, c’est la foi en Jésus-Christ, alors nous frémissons à la pensée que ces personnes auraient pu se taire, et que nous soyons passés à  côté de connaître « Celui qui est le chemin, la vérité et la vie » (Jn 14,6).

Le dernier point que je voudrais aborder, est la façon différente dont Dieu s’adresse à son prophète, et dont Jésus s’adresse à ses disciples.

   Je relis ce que Dieu dit à Ézéchiel : « Quand je dirai au méchant : ‘Tu vas mourir, c’est certain’, si tu ne l’avertis pas, si tu ne parles pas pour avertir le méchant afin qu’il renonce à sa mauvaise conduite et reste en vie, ce méchant mourra à cause de sa faute, mais je te réclamerai son sang» (Ez 3,18). 

 Je relis ce que Jésus dit à ses disciples juste avant de remonter vers son Père : « Allez dans le monde entier et prêchez la Bonne Nouvelle à toute la création. Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné ».

   Sur le fond, les 2 textes disent exactement la même chose : Le devoir d’annoncer aux hommes qu’ils doivent obéir à Dieu s’ils ne veulent pas être condamnés.

  Mais sur la forme, ils sont différents. En effet, Dieu adresse une mise en garde à Ézéchiel : Si tu ne parles pas pour avertir le méchant… je te réclamerai son sang.

Jésus ne dit rien de tel à ses disciples : « Prêchez la Bonne nouvelle… et celui qui ne croira pas sera condamné ». Jésus n’adresse aucune mise en garde à ses disciples, présents et futurs. Comment peut-on expliquer cela ? Est-ce que pour Jésus, la mission qu’il donne à ses disciples est moins importante, ou facultative ?

NON ! Elle est tout aussi importante. Dieu ne peut pas se contredire : son amour ne fluctue pas ! Son désir de sauver les hommes, non plus !

La différence tient au fait que :

  — dans l’AT, le salut est fondé sur l’obéissance à la loi, d’où la mise en garde de Dieu à l’égard du prophète, s’il n’obéit pas.

  — dans le NT, le salut est fondé sur la grâce. Lorsqu’un chrétien a pris conscience de ce que signifie, pour lui, la grâce, lorsqu’il a compris jusqu’où est allé l’amour de Jésus pour lui, c’est-à-dire, jusqu’à la Croix, l’obéissance n’est plus perçue comme une contrainte ; il n’obéit plus par devoir, mais par amour pour Jésus qui l’a sauvé gratuitement.  Cette obéissance joyeuse et reconnaissante agit comme un cercle vertueux : l’amour pour Jésus grandit, et l’amour pour ceux qui ne connaissent pas encore Jésus grandit aussi, ce qui pousse le chrétien à parler de Jésus aux autres.

   C’est l’Esprit-Saint qui vit en nous, qui nous pousse à annoncer Jésus aux autres.

   C’est aussi l’Esprit-Saint qui nous encourage, lorsque nous avons besoin d’être fortifié pour cette mission.

« Allez dans le monde entier et prêchez la Bonne Nouvelle à toute la création. Celui qui croira et qui sera baptisé sera sauvé, mais celui qui ne croira pas sera condamné »

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