• le 1 octobre 2023

REVÊTIR CHRIST

Alain NADAL

Rm 13,14 : « Revêtez-vous du Seigneur Jésus-Christ et ne vous mettez pas en souci de la chair pour en satisfaire les convoitise. »

Gal 3,27 : « Vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu Christ. »

Col 3,12 : « Ainsi donc, comme des élus de Dieu, saints et bien-aimés, revêtez-vous d’ardente compassion, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience. »

Dans Eph 4, 21-24, Paul nous invite à nous dépouiller de notre vieille nature, à être renouvelés par l’Esprit dans notre intelligence et à revêtir la nature nouvelle, créée selon Dieu dans une justice et une sainteté que produit la vérité. 

   Le verbe qui revient dans ces 4 passages est « revêtir » ; Revêtir soit Christ, soit la compassion, la bonté, l’humilité, la douceur et la patience, ou encore la nature nouvelle créée selon Dieu.

   Il est donc important de bien saisir le sens que Paul veut donner à ce verbe. Sinon, nous ne comprendrons pas en quoi consiste la relation intime que Christ veut  établir entre Lui et chaque enfant de Dieu.

   Au matin de son mariage, lorsqu’une femme revêt sa robe de mariée, (dans laquelle elle a investi tant d’espérances, de rêves et … d’argent), elle peut avoir l’impression d’être une princesse, en se regardant dans le miroir de son dressing. Cette impression peut même se renforcer tout au long de la journée, tant les compliments pleuvent sur elle de la part des invités : Ma chérie, tu es ravissante ! Ta robe est sublime ! Il en a de la chance, ton mari ! …

   Le lendemain, lorsqu’elle a quitté ce vêtement flatteur, elle se retrouve habillée comme tout le monde ; alors l’illusion se dissipe et la ramène à la réalité : Elle n’était pas une vraie princesse !

   Dans le même registre, on a entendu des acteurs témoigner qu’en revêtant un costume des siècles passés et en se mettant dans la peau du personnage historique qu’ils incarnent, ils sont parfois marqués par leur rôle, pendant le temps du tournage d’un film. 

   Puis vient la fin du tournage ; la réalité reprend le dessus. L’habit ne fait pas le moine !

   Dans le cas de la mariée ou des acteurs de cinéma, le vêtement qu’ils enfilent est superficiel. Cela ne change ni leur personnalité, ni leur nature profonde, même si pour un temps, ils ont l’illusion d’avoir été quelqu’un d’autre. 

   Il en va de même lorsque, pour une raison ou pour une autre, les hommes se contentent d’enfiler un « costume de chrétien » sans être passés par la repentance, la nouvelle naissance, et sans avoir compris ce que veut dire « revêtir Christ ». 

   Dans Rm 13,14, le premier texte que je vous ai lu, je voudrais souligner que Paul marque l’incompatibilité entre la volonté de revêtir Christ, et le souci de satisfaire les désirs de la chair, c’est-à dire les désirs de notre vieille nature pécheresse : « Revêtez-vous du Seigneur Jésus-Christ et ne vous mettez pas en souci de la chair pour en satisfaire les convoitise. »

   Dans Gal 3,27, Paul semble parler d’un automatisme : « Vous tous qui avez été baptisés en Christ, vous avez revêtu Christ. » Comprenons qu’il y a automatisme  seulement lorsque le baptisé a compris le sens du baptême, et vit son baptême tel que Paul en parle : « Nous avons été ensevelis avec Lui (Jésus) par le baptême, afin que, comme Christ est ressuscité d’entre les morts par la gloire du Père, de même nous aussi  nous marchions en nouveauté de vie » (Rm 6,4). C’est-à-dire, nous sommes appelés à mener notre existence sur un plan nouveau.

   Dans Col 3,12, il n’est pas question de « revêtir Christ », mais de se revêtir « d’ardente compassion, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience. » Toutes ces vertus sont la nature-même de Christ. Les revêtir, c’est donc « revêtir Christ ».

   Dans Eph 4,21, Paul nous indique les étapes par lesquelles nous devons passer pour « revêtir Christ » : 1) Nous dépouiller de notre vieille nature, 2) être renouvelé par l’Esprit dans notre intelligence et  3) revêtir la nature nouvelle, créée selon Dieu dans une justice et une sainteté que produit la vérité ».

   Vous remarquerez que l’homme à une décision à prendre : Se dépouiller de sa vieille nature, pour que Dieu le revête lui-même de de la nouvelle nature qu’il lui accorde en Christ. Dieu ne force jamais la main d’un homme. Il attend toujours son consentement.

  Revêtir Christ c’est donc beaucoup plus qu’une couche de « vernis de chrétienté ». Revêtir Christ, c’est comme porter Christ en permanence comme un manteau qui nous enveloppe complètement, et tellement proche de soi qu’il fait partie de soi, et qui permet aux caractères et aux vertus de Christ de s’infiltrer jusque dans les profondeurs de notre être.  Revêtir Christ, c’est vivre chaque jour ce que Paul a écrit quand il parle de sa relation avec Lui  : « Ce n’est plus moi qui vis, c’est Christ qui vit en moi » (Gal 2,20).

   Comme je l’ai dit à propos d’Eph 4, nous avons des décisions à prendre avant que Dieu nous comble de toutes les grâces qu’il a en réserve pour ceux qui s’abandonnent totalement à Lui. 

   Il est donc important de comprendre l’importance de nos choix quand il s’agit de nous dépouiller de ce qui est vieux et malade et de nous revêtir de ce qui est nouveau et bon. 

     En effet, le caractère trompeur du péché et de ce qui finit par arriver à notre être le plus profond lorsque nous « revêtons » ou portons un vice, est une chose horrible à contempler.

   Écoutons ce que dit le psalmiste à ce propos, dans le Ps 109 : « Cet homme n’a eu aucun souci d’agir avec bonté, mais il a poursuivi un homme pauvre, malheureux, profondément abattu, afin de l’achever. Il s’est tellement plu à maudire, que la malédiction est venue sur lui. Il a si peu aimé bénir, que la bénédiction s’est éloignée de lui. Il s’est comme habillé de malédiction, alors elle est entrée en lui comme de l’eau, elle l’a imbibée comme de l’huile »  (Ps 109,16-18, Version Français courant). 

   Une expression résume exactement ce que dit ce passage, en parlant d’une personne méchante : « Cet homme est le mal personnifié ». Inversement, dans le sens du bien : « Cette personne est la douceur personnifiée ».

  Comprenons bien que l’homme dont parle le psalmiste a fait un choix, consciemment, un mauvais choix sans doute, mais un choix tout de même.

   Si nous remplaçons le mot « malédiction » par celui d’un vice dont nous avons conscience dans notre vie, que ce soit la colère, l’envie, la convoitise, le mensonge, l’hypocrisie, l’ambition, l’orgueil, la haine, l’amertume…, quelles peuvent être les conséquences pour nous, si nous n’y mettons pas un terme ?. Retenons simplement le mensonge. Cela donne :  » Il a revêtu le mensonge…, il s’est comme habillé de mensonge,  alors il est entré en lui, comme de l’eau, elle l’a imbibé comme de l’huile ».

   Cela veut dire que quel que soit le sombre vêtement dont nous nous revêtons, son influence entre en nous avec des tentacules semblables à celles d’une pieuvre. Nous finissons par découvrir que notre vêtement extérieur reflète une réalité profonde et terrifiante. Nous ne sommes plus seulement affligés par le mensonge, ou la colère, ou la convoitise ou tout autre vice, mais nous sommes devenus essentiellement ces vices. Dans nos propres corps, nous sommes devenus de véritables temples de ces vices particuliers. L’image extérieure que nous avons revêtue reflète désormais un état intérieure que nous n’aurions peut-être jamais imaginé au départ. 

   Ces paroles vous semblent-elles excessives ? Elles se sont pourtant toujours vérifiées tout au long de l’histoire et jusqu’à notre époque. Pensons aux autocrates, aux dictateurs, ou aux personnes, qui font la une des journaux télévisés. On se demande comment il est possible qu’ils en soient arrivés à commettre des actes aussi horribles. Il suffit d’écouter ce que Paul écrivait au début du premier siècle de notre ère pour avoir la réponse : « Comme les hommes n’ont pas jugé bon d’avoir la connaissance de Dieu, Dieu les a livrés à une mentalité réprouvée, pour commettre des choses indignes ; ils sont remplis de toute espèce d’injustice, de méchanceté, de cupidité, de perfidie ; pleins d’envie, de meurtres, de discorde, de fraude de vice ; rapporteurs, médisants, impies, emportés, orgueilleux, fanfarons, ingénieux au mal, rebelles à leurs parents, sans intelligence, sans loyauté, sans affection, sans indulgence, sans pitié » (Rm 1,28-31).

   Lorsque Dieu, par l’intermédiaire de Paul, nous demande dans l’Écriture de nous dépouiller du péché qui nous souille, il sait très bien que nous avons non seulement besoin d’être délivrés du péché, mais aussi de ses rejetons malsains qui se sont frayés une voie dans les profondeurs de notre moi. Ce n’est que par Christ que nous pouvons déraciner et arracher ces choses.

   Les vertus et les vices sont des choses très réelles ;  elles produisent des fruits. Les vices produisent des péchés spécifiques et des habitudes vicieuses qui forment un mauvais caractère. Les vertus produisent de bonnes actions, de bons traits de caractère, et, lorsqu’elles sont soumises au Saint-Esprit, elles produisent même les fruits de l’Esprit.

    Les Écritures nous exhortent à nous revêtir des unes et à nous dépouiller des autres. Le fait que ces exhortations soient des commandements ne signifie pas que nous devons tenter d’agir en dehors de la grâce de Dieu. Nous ne pouvons rien faire sans cette grâce.

   Il existe un vice qu’il est important de démasquer : C’est l’hypocrisie. Pourquoi est-ce important ? Parce que si quelqu’un enfile l’habit d’un personnage chrétien afin de sauvegarder les apparences, il tombe dans les griffes de l’incrédulité. Son amour et sa crainte de Dieu seront absents. Son cœur sera endurci par la tromperie du péché qui usurpe la place de l’amour véritable et de la crainte de Dieu. Alors s’insinuera dans son cœur la crainte des autres et de ce qu’ils pensent de lui. Son cœur, privé des habitudes vertueuses, du fruit du Saint-Esprit, et de Dieu lui-même, va se durcir. Il devient un « sépulcre blanchi », comme l’a dit Jésus aux Pharisiens : « Malheur à vous, scribes et Pharisiens hypocrites ! Parce que vous ressemblez à des sépulcres blanchis qui paraissent beaux dehors, et qui au dedans sont pleins d’ossements de mort et de toute espèce d’impureté » (Mt 23,27).

   Contrastant avec l’orgueil des hypocrites, il y a l’humilité des saints, des croyants véritables. Revêtir Christ, c’est grandir dans la compréhension qu’en dehors de Dieu, le cœur de l’homme est déchu. Tous les vices sont des rejetons du cœur de l’humanité déchue. Plus la connaissance de la bonté de Dieu est grande dans le cœur des saints, plus ils savent que ce qu’il y a de meilleur en eux ne vaut rien en dehors de Dieu. Ils comprennent que le « bon » qui est en eux dégénère et ne résiste pas à l’épreuve du temps. 

   Comprendre qu’il faut revêtir les pensées et les vertus de Christ, c’est la clé de notre restauration personnelle. Un dicton le dit avec d’autres mots : « Sème une pensée, tu récolteras une action ; sème une action, tu récolteras une habitude ; sème une habitude, tu récolteras un caractère ; sème un caractère, tu récolteras une destinée ».

   La discipline qui consiste à revêtir Christ est de la plus haute importance dans la guérison des âmes malades. Elle est cruciale dans le processus de guérison de chaque personne.

   En effet, ce bien que nous « revêtons » se glisse jusqu’au fond de nous-mêmes et rejoint l’image de Dieu en nous. C’est ainsi que nous commençons à collaborer avec l’Esprit-Saint  pour faire la volonté du Père. Nous imitons Christ, comme le recommande Paul : « Puisque vous êtes les enfants bien-aimés de Dieu, suivez l’exemple de votre Père. Que votre vie soit dirigée par l’amour, comme cela a été le cas pour Christ : Il nous a aimés et a livré lui-même sa vie à Dieu pour nous, comme une offrande et un sacrifice dont le parfum plaît à Dieu » (Eph 5,1).

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