Matthieu 13, 44-46
Qu’est-ce que le royaume de Dieu ?
Mystère et paradoxe
Avant de voir comment on s’en approche, on va essayer de comprendre ce qu’est le royaume de Dieu. Une petite parenthèse pour ceux qui découvrent les richesses de la vie en Christ : on peut dire que royaume de Dieu et royaume des Cieux sont des synonymes.
Le royaume de Dieu, c’est un mystère et un paradoxe ; on ne peut pas le saisir, le circonscrire, et il recouvre des réalités très différentes. Quand j’ai dit cela, on est bien avancé, n’est-ce pas ?
C’est un royaume pour aujourd’hui, pour l’ici et maintenant, et en même temps, un royaume à venir. Il est à la fois déjà présent tout en étant encore à venir. Une réalité et une promesse. Jésus, devant Pilate, déclare ouvertement que sa « royauté n’est pas de ce monde » (Jean 18, 36) et pourtant, il enseigne à ses disciples comment s’en approcher.
C’est un royaume terrestre qui n’est pas délimité dans l’espace et dans le temps. Il y a un roi qui règne sur ce royaume de toute éternité : Dieu lui-même. Son pouvoir est présent, actuel et illimité.
Il nous concerne nous, êtres humains vivants sur terre, et aussi ceux qui sont déjà morts. Est-ce qu’on peut dire que les hollandais qui sont morts sont toujours des sujets de sa majesté Willem-Alexander ? Je ne crois pas. Les fils et les filles de Dieu, si : morts ou vivants, ils ont toujours Dieu comme Roi … et comme père.
Il ne se manifeste pas dans la richesse et dans le faste – il n’y a qu’à regarder le bébé Jésus dans la mangeoire qui lui sert de berceau – et en même temps, il est ce royaume décrit dans l’Apocalypse, où Jésus siège sur un trône à la droite de son Père en ce moment même, et pas seulement à la fin des temps.
La souveraineté de Dieu n’écrase pas mais elle s’exerce dans l’amour, l’abaissement, le don de soi, la faiblesse : regardez Jésus, fils du Roi, à genoux devant ses disciples en train de leur laver les pieds !
Une définition
Alors, pour finir cette introduction, on pourrait donner une esquisse de définition pour comprendre un peu ces paraboles. Le royaume de Dieu, c’est la promesse de vivre en communion avec lui ; c’est Lui en moi et moi en Lui. Ce n’est pas un lieu physique dans lequel je dois entrer (un temple, une église une synagogue), ce n’est pas une série de recommandations à suivre, des bonnes actions à accomplir ; c’est une relation avec Dieu lui-même, par l’intermédiaire de Jésus qui a donné sa vie pour que ce soit possible. Ce n’est pas une vue de l’esprit quand Jésus dit qu’Il est la porte : Il EST la porte ; c’est par Lui qu’on doit passer pour entrer dans cette relation. Si tu as l’impression d’aller droit dans le mur, passe par la porte !
Ce que Jésus souligne à plusieurs reprises dans ces paraboles, c’est que l’entrée dans le Royaume est à rechercher et nécessite une conversion. Comment ça se passe ? Retournons au texte.
Une radicale radicalité
Les deux paraboles ont ceci en commun qu’elles parlent du royaume de Dieu et de la découverte de quelque chose de précieux. Ce qui m’a tout d’abord frappée en lisant ce texte, c’est le côté radical de ce qu’il se passe : une fois qu’ils ont découvert le trésor ou la perle, l’homme et le marchand n’ont plus qu’un objectif : l’acquérir. Et pour cela, ils vendent tout. C’est radical, non ?
J’aime bien « incarner » les textes bibliques pour mieux les saisir. Rappelez-vous, c’est ce que nous avons dit de Michelle, l’amie que nous soutenons au Bénin : en 2019, elle a découvert la misère là-bas, elle a TOUT vendu, TOUT quitté et elle est partie se mettre au service de ces plus pauvres. Et pour l’avoir beaucoup fréquentée à cette époque, pendant des mois de préparatifs, tout en elle était tourné vers son objectif. Tout passait par le prisme de ce départ. Elle n’avait plus que cela en tête et son énergie était réservée à ce projet. Et tout cela dans la joie, par-dessus le marché ! Nous qui la connaissions, nous avons tous été scotchés, mais je n’avais pas compris que c’était à l’image de ce qui est décrit ici : une radicalité radicale.
Un double mouvement
Je m’adresse à nous qui connaissons ce texte par cœur. Sans regarder le texte : à quoi est comparé le royaume de Dieu dans la première image ? Le trésor dans le champ. Et dans la deuxième ? Le marchand. Eh oui, le marchand, et pas la perle. C’est étrange, non ? Le royaume de Dieu est comparé à un trésor, et pas la perle (pourtant trésor par excellence) : c’est celui qui la cherche qui est comparé au royaume. Et vous savez qui est la perle ? Danielle nous l’a rappelé la semaine dernière. La perle c’est nous, les humains ; c’est toi, c’est moi, c’est ton fils, ta fille, ton frère, ta voisine, ton ennemie. Nous sommes la perle de Dieu, la prunelle de ses yeux, les chouchous de son cœur. On est tellement précieux pour Lui qu’Il a donné tout ce qu’Il avait pour nous avoir dans son royaume : Jésus, son propre Fils. Cette réalité, Il ne le l’imposera jamais. Il la met à ta disposition (c’est le royaume de Dieu) et tu peux l’accepter si tu veux.
Un trésor
Donc, le Royaume de Dieu c’est un trésor : on le regarde ensemble, ce trésor ? On l’ouvre, cette cassette, pour entrevoir ce qu’il y a dedans ? Alors, on y trouve, dans le désordre : la richesse de la relation avec Lui, l’intimité qu’on peut avoir avec Lui, la merveille de l’amour qu’Il nous porte. Tiens, je vois aussi la robe blanche dont il nous habille quand on demande pardon. Je vois ton nom inscrit sur les paumes de ses mains. Il y a aussi la sagesse qu’il veut nous donner, la consolation que l’on peut recevoir, les révélations du saint esprit, toutes les promesses qu’on peut trouver dans la bible. Bon, c’est inépuisable, on n’en fera jamais le tour, j’arrête là.
On peut trouver que Willem-Alexander est un bon roi qui fait ou permet des bonnes choses pour ses sujets, on peut choisir de déménager dans son royaume pour être au bénéfice de ses largesses. Mais cela ne nous garantit pas pour autant une intimité avec lui. Cela ne nous garantit pas d’être aimé de lui. Cela ne nous garantit pas que nous hériterons de son royaume. Avec Dieu, si.
Une personne
Le royaume de Dieu c’est un trésor, et c’est aussi une personne : Celui qui cherche la perle de grand prix, Celui qui te cherche. Le royaume de Dieu ce sont des choses qui sont faites pour nous, et c’est aussi quelqu’un qui est prêt à tout donner pour entrer en relation avec toi, pour que tu reçoives son amour. C’est comme le côté pile et le côté face d’une même pièce. L’une n’existe pas sans l’autre.
Il y a deux mouvements pour entrer dans le royaume de Dieu : celui de l’homme qui trouve un trésor et se dépossède de ce qu’il a pour l’acheter, et celui du marchand qui se dépossède pour acquérir ce qui lui est précieux : toi, moi.
C’est parce que Dieu cherche chacun de nous que nous pouvons le trouver. Et c’est parce que nous le cherchons qu’Il nous trouve.
Le marchand qui se dépossède, c’est déjà fait au travers de Jésus. L’homme qui se dépossède pour trouver le royaume de Dieu, c’est à toi de le faire.
Une différence de taille
Découverte fortuite / recherche assidue
En fait, je devrais annoncer deux différences importantes entre cet homme et le marchand.
La première : on nous parle d’une découverte fortuite et d’une recherche assidue. A qui la recherche assidue ? Au marchand.
On imagine bien les brocanteurs qui sont debout à 4h du matin pour dénicher LA perle rare dans les brocantes et vide-greniers qui fleurissent dès les beaux jours. Ou bien ceux qui surveillent Ebay pour les mêmes raisons. Mais on est bien d’accord qu’il y a un moment où ils font une pause : manger, boire, se reposer et j’en passe, ils ont des besoins à respecter.
Eh bien pas Dieu ! « Il ne dort ni ne sommeille, celui qui garde Israël ». C’est une promesse que nous avons lue dans le psaume tout à l’heure. Le Seigneur nous cherche sans relâche, inlassablement. Et il n’a jamais assez de perles à récolter, d’hommes et de femmes à aimer ! Tu peux le trouver à toute heure du jour et de la nuit. Pas besoin de prendre rendez-vous. Pas besoin de prendre un ticket comme à la poissonnerie. Il est là, toujours présent, toujours disponible, même s’Il s’occupe parfaitement de ton voisin. Tu as peut-être eu l’habitude de laisser ta place pare qu’il y avait un plus petit que toi qui réclamait des soins, ou un plus malade, un plus fragile. Ta maman n’avait pas 36 mains. Peut-être l’as-tu entendu pour de vrai. Tu as dû te consoler tout seul, tu as pris l’habitude qu’on n’ait pas le temps à te consacrer. Avec Dieu, tu peux connaître une révolution : Il est là pour toi, tout le temps et en toute occasion. Rien ne Lui échappe.
Deux poids, deux mesures
La deuxième différence tient au prix d’achat. Personne ne peut acheter le Royaume de Dieu à son vrai prix. Personne ne peut l’acheter tout court, d’ailleurs. Cette parabole reste une image. Penser qu’on pourrait l’acheter, c’est adhérer à une doctrine de salut par les œuvres. Cela voudrait dire que nous pourrions par nos efforts, par notre recherche et par nos propres moyens accéder au royaume des cieux. C’est totalement contraire à tout le message de l’évangile.
L’homme qui a découvert le trésor dans un champ le cache à nouveau. Il va acheter un champ sans dire qu’il recèle un trésor. Il achète le champ au prix du champ. Et il acquiert un trésor au prix d’un champ.
Alors que le marchand achète la perle fine à son prix réel. Quel est le prix de cette perle ? Quel est le prix de ma vie ? Si je considère mes propres mérites, pas bien cher. Mais c’est justement là le message si bouleversant de l’évangile : malgré mes défauts, malgré mes trahisons, malgré mes craintes, j’ai une valeur inestimable aux yeux de Dieu. Alors, quel est le prix que Dieu a payé pour me trouver ? La vie de son Fils.
C’est un mystère pour moi, pourquoi Dieu en est-il passé par là, je ne sais pas, mais c’est une réalité : Jésus a donné sa vie pour que je fasse partie du Royaume de son Père. Un royaume dont Il a hérité, et dont je suis cohéritière. Tout ce que le Père a, le Fils le possède. Et tout ce que le Fils possède, j’en ai hérité aussi.
Un autre mystère que seul le saint esprit peut éclairer pour nous.