1 Co 2,10 b-15
Dans le passage que je viens de lire, Paul emploie plusieurs fois les mots « esprit » ; soit avec une majuscule pour parler de l’Esprit de Dieu, soit avec une minuscule pour parler de l’esprit de l’homme.
Nous savons tous que ce sont deux réalités différentes qu’il ne faut pas confondre.
Mais au v. 14, Paul parle de l’homme « psychique ». L’adjectif « psychique » vient du grec psukè, qui signifie « âme ». Il nous montre ici que l’homme est aussi constitué d’une âme. Mais la chose importante, c’est que cette âme est incapable de comprendre les choses de l’Esprit. Je cite : « elles sont une folie pour lui, et il ne peut les connaître, parce que c’est spirituellement qu’on en juge ».
Il est donc important d’apprendre et de comprendre ce qui distingue l’âme et l’esprit. Pourquoi ? Je cite ici ce qu’écrit Watchman Nee : « Comment peut-on comprendre la vie spirituelle si l’on ignore jusqu’où va le domaine de l’esprit ? Et comment croître spirituellement si l’on n’a pas une idée claire de la chose ? La confusion entre l’âme et l’esprit est fatale à la vie spirituelle. Les chrétiens prennent souvent pour spirituel ce qui est du domaine de l’âme, et s’arrêtent à l’aspect psychique sans rechercher ce qui est vraiment spirituel. Comment pouvons-nous éviter une perte si nous confondons ce que Dieu distingue » (L’homme spirituel, p. 13).
Examinons d’abord ce que dit la Bible sur la façon dont Dieu a créé l’homme.
En Genèse 2,7, il est écrit : « L’Éternel Dieu forma l’homme de la poussière : il insuffla dans ses narines un souffle de vie, et l’homme devint une âme vivante ». Le souffle de vie donné par Dieu, c’est ce que les Écritures appellent « l’esprit », avec un « e » minuscule. Dès que ce souffle de vie est entré dans l’homme, le corps, qui était sans vie jusque là, s’est trouvé vivifié par cet esprit donné par Dieu, et cela eut pour conséquence de créer l’âme. C’est l’âme qui donne à l’homme vivant la conscience de de son existence.
Ce simple verset de la Genèse nous montre que « l’homme complet est une trinité — la composition de l’esprit, de l’âme et du corps » (Watchman Nee, p. 15).
De quoi se compose l’esprit de l’homme ?
La Bible nous permet de discerner 3 parties :
1) La conscience : C’est l’organe du discernement. La conscience nous permet de distinguer le bien du mal, sans se référer aux opinions du dehors : si un homme commet le mal, sa conscience le lui fera savoir.
2) L’intuition : C’est une forme de connaissance qui vient à l’homme, sans le secours de l’intelligence, du sentiment ou de la volonté. C’est par son intuition que les révélations de Dieu se font connaître au croyant, ainsi que tous les mouvements du Saint-Esprit. Le croyant doit donc être attentif à ces deux éléments : la voix de la conscience et l’enseignement de l’intuition.
3) La communion : C’est ce qui conduit à adorer Dieu.
Ces 3 éléments sont dans une profonde dépendance mutuelle. Notre adoration de Dieu et les communications de Dieu avec nous se situent dans l’esprit. Elles se manifestent dans « l’homme intérieur » ; elles ne peuvent pas se manifester dans l’âme. Par son esprit, l’homme est en relation avec le monde spirituel et avec l’Esprit de Dieu.
Que désigne le mot « âme » ?
L’âme, c’est notre personnalité, notre ego, notre moi. Elle se compose de 3 parties qui sont présentes dans chaque homme.
1) L’intelligence est la partie principale de l’âme. C’est l’organe par lequel nous pensons, méditons, réfléchissons, mémorisons. Depuis que l’homme a goûter le fruit que Dieu lui avait interdit de manger (Gn 2,17), il vit essentiellement dans l’intelligence, et se laisse diriger par les pensées de son intelligence. La plupart du temps, ce sont ses pensées qui dirigent ses actes.
2) L’émotion est la partie de l’âme qui inclut l’amour, la colère, le chagrin et la joie. L’homme aime, hait, se réjouit, est chagriné, excité ou déprimé. Ces différents états de l’homme sont des fonctions émotionnelles de son âme. Certaines personnes très émotives, réagissent aux circonstances par leurs émotions. Elles ne se laissent pas facilement convaincre par l’intelligence, mais sont facilement atteintes dans leurs émotions.
3) La volonté est la partie de l’âme où l’homme prend des décisions. Il décide, il détermine, il juge, il choisit, il accepte ou il refuse.
Les 2 catégories d’hommes
Dans les versets 13 et 14, nous voyons que Paul distingue 2 catégories d’hommes : d’une part, les hommes naturels ou psychiques ; d’autre part, les hommes spirituels. Que veut-il dire ?
— Un homme psychique est un être qui se laisse essentiellement diriger par son âme.
— Un homme spirituel est un être qui se laisse essentiellement diriger par son esprit.
Pourquoi Paul tient-il à expliquer cette différence ?
Parce que lorsqu’on ignore cette différence, cela a des conséquences dramatiques pour la foi.
En effet, le verset 13 nous dit qu’il est possible d’instruire un « homme spirituel » des réalités spirituelles, car il a la capacité de les comprendre.
Par contre, le verset 14 nous dit que « l’homme psychique » « ne reçoit pas les choses de l’Esprit de Dieu, car elles sont une folie pour lui, et il ne peut les connaître, parce que c’est spirituellement qu’on en juge ».
Ces deux versets nous disent une chose capitale dont un chrétien doit avoir conscience, et qu’il ne doit jamais oublier : Ne pas comprendre la différence entre l’âme et l’esprit, c’est la porte ouverte pour se mettre à douter de ce qu’affirme la Bible ; c’est prendre le risque de juger de la vérité des textes bibliques à l’aune de son intelligence d’homme.
L’intelligence que Dieu a accordée à l’homme est une chose magnifique. Mais lorsque, volontairement ou non, elle est déconnectée de son esprit, c’est-à-dire lorsqu’elle veut être indépendante de l’esprit, c’est elle qui définit ce qu’est la vérité, avec toutes les dérives que cela peut entraîner.
Les exemples ne manquent pas pour illustrer cette déconnection, cette indépendance : De très nombreux chrétiens nient la résurrection corporelle de Jésus ; ils nient la virginité de Marie, l’existence de Satan, la réalité des miracles, etc…, sans parler des déviances sur le plan éthique. Pourquoi ? Parce que leur intelligence a pris le pouvoir sur l’esprit.
Seul l’esprit de l’homme est capable d’entrer en communion avec le Saint-Esprit, c’est-à-dire l’Esprit de Dieu, et de comprendre les vérités que nous enseigne la Bible. Lorsque l’âme est indépendante de l’esprit, ces vérités semblent incongrues et absurdes. L’âme considère ces choses comme une folie, car l’âme est incapable de comprendre les choses de l’Esprit de Dieu, comme le dit Paul au verset 14.
Nous connaissons tous des hommes ou des femmes intelligents, sensibles, qui rejettent violemment tout ce dit la Bible, ou qui y sont indifférents.
Certaines personnes sont davantage portées sur l’intelligence, d’autres sur les émotions, d’autres encore sur la volonté. Mais dès qu’une personne laisse conduire sa vie par une de ces trois parties, elle devient une personne psychique (naturelle), comme l’écrit Paul. Autrement dit, c’est son âme qui dirige sa vie.
Je veux souligner que l’âme n’est pas nécessairement directement liée au péché. Bien souvent, si un homme psychique ne pèche pas, il n’est pas considéré comme charnel aux yeux des hommes. Il peut être considéré comme un homme bon. Aux yeux des autres, il apparaît souvent comme ayant peu de défauts. S’il réagit d’une façon équilibrée dans ses émotions, ou s’il fait preuve d’une volonté ferme, s’il a une intelligence vive, il fait souvent l’admiration des autres hommes.
Cependant, aux yeux de Dieu, son esprit est bloqué, et sa compréhension spirituelle est très faible, car il reste un homme psychique.
La difficulté qu’éprouvent de nombreux chrétiens pour les choses spirituelles est souvent liée à une pensée trop active. Pourquoi ? Parce qu’ils ont l’habitude d’utiliser leur intelligence lorsqu’il s’agit de considérer les choses spirituelles. Ils ne réalisent pas que l’intelligence n’a aucune capacité pour comprendre l’esprit, puisque l’intelligence est une partie de l’âme.
Pour d’autres, l’obstacle est la volonté. Ils jugent et décident en étant dépendants de leur volonté pour chaque situation. Ainsi, sans même en être conscients, ils vivent dans leur âme et ont du mal à comprendre les choses spirituelles.
Chaque personne a tendance à vivre et à agir dans la partie de son âme qui est la plus forte. Et c’est cette partie qu’elle va utiliser pour faire face aux différentes situations de la vie.
Qu’est-ce qu’un homme spirituel ?
Ce qui a été dit jusqu’à maintenant nous permet de mieux comprendre ce que Paul entend par « homme spirituel ».
C’est une personne qui ne laisse diriger sa vie ni par son intelligence, ni par ses émotions, ni par sa volonté. Autrement dit, c’est son esprit qui dirige sa vie. C’est ce que Dieu voulait en créant l’homme. Et c’est ce que l’homme a perdu en désobéissant à Dieu au Jardin d’Eden.
Bien que les personnes spirituelles aient aussi une âme, et bien que l’intelligence, les émotions et la volonté soient bien présentes en elles, elles ne vivent pas par ces fonctions de l’âme. Elles vivent par l’esprit et dans l’esprit. Elles permettent à l’esprit d’être le maître et la source de toutes leurs actions, et de leurs comportements. L’esprit occupe en elles une place dominante. Et l’âme occupe en elles une place de soumission. L’intelligence, les émotions, la volonté continuent à jouer leur rôle, à être actives. Mais elles sont sous le gouvernement de l’esprit et sont dirigées par l’esprit.
Bien qu’elles sachent faire usage de leur intelligence, de leurs émotions et de leur volonté, ces personnes spirituelles suivent, en premier lieu, les directives de l’esprit. Elles refusent la domination de l’âme, elles refusent d’être dirigées par une des 3 parties de leur âme. Elles permettent donc vraiment à l’esprit de diriger tout leur être, sous la conduite de l’Esprit-Saint.
En toutes circonstances, leur premier réflexe est d’utiliser leur esprit en cherchant quelle est la pensée du Seigneur face à une situation donnée. C’est seulement après avoir saisi la pensée du Seigneur, qu’elles utilisent leur intelligence pour comprendre cette pensée. Elles utilisent leurs émotions pour exprimer cette pensée, et elle utilisent leur volonté pour accomplir ce que cette pensée leur montre.
On pourrait croire qu’un chrétien ne peut être qu’un homme spirituel, et en aucun cas un homme psychique.
Malheureusement, beaucoup de chrétiens sauvés, parce qu’ils croient au sacrifice de Jésus, vivent par leur âme, parce qu’ils ne connaissent pas la différence entre l’esprit et l’âme, et ce que cela implique. De ce fait, ils ignorent que Dieu désire les délivrer de se laisser conduire par leur âme afin qu’ils vivent par leur esprit.
Un chrétien qui ne comprend pas cela pense qu’il est convenable et nécessaire de vivre par l’intelligence, les émotions ou la volonté de son âme, et que tout va bien pourvu qu’il se donne de la peine et ne pas commettre d’erreur. Ce dont il n’est pas conscient, c’est que pour être chrétien au vrai sens du terme, cette attitude et ce genre de vie ne sont pas dans le plan de Dieu pour lui.
D’autres chrétiens savent que leur esprit a été vivifié, lorsqu’ils sont nés de nouveau, que leur esprit est différent de leur âme, que Dieu aimerait qu’ils vivent de leur esprit. Ils continuent pourtant à se plaire dans leur âme et à vivre dans cette sphère. Pourquoi ? Parce qu’ils sont trop habitués à vivre de cette façon, et ils ne comprennent pas vraiment l’importance de vivre par esprit.
Ils savent que l’homme doit s’approcher de Dieu par l’esprit, mais ils continuent à utiliser leur âme pour toucher les choses divines. Ils ne cultivent pas l’habitude d’utiliser l’esprit. Ces personnes sont de « bons chrétiens », comme on dit, mais ne sont pas des chrétiens spirituels. Ils ont besoin d’être délivrés, non pas du péché, puisque c’est déjà fait par leur foi en Christ, mais de l’indépendance de leur âme. Ils ont besoin d’être délivrés non pas de la chair mauvaise que l’homme n’a aucune peine à condamner, mais de l’âme bien propre, si appréciée de tout le monde. S’ils ne passent pas par une telle délivrance, ils restent étrangers aux choses de l’Esprit de Dieu.
En effet, l’intention de Dieu n’est pas de nous délivrer de toutes nos fautes, pour nous amener à un état de perfection. Son vrai désir est de nous délivrer de l’indépendance de l’âme pour que ce soit l’esprit qui dirige toute notre vie. Dieu ne veut pas que nous vivions seulement une vie sans faute, il désire surtout nous voir mener une vie spirituelle.
Malheureusement, en grande partie à cause de leur ignorance concernant la différence entre l’esprit et l’âme, de nombreux chrétiens vivent toujours dans leur âme et s’épuisent à mener une vie parfaite, par la vie de leur âme. Leur esprit est certes vivifié, mais ils ne savent pas qu’ils doivent l’utiliser pour vivre par lui. Toute leur vision des choses, leurs jugements, leur penchants et leurs inclinaisons sont dans l’âme et non dans l’esprit. Même si leurs pensées sont pures, leurs émotions équilibrées, leurs décisions précises, ils restent psychiques et non spirituels.
Comment pouvons-nous être délivrés de vivre par l’âme ?
Nous avons besoin d’une double révélation : l’une concerne l’âme, l’autre concerne la croix.
Le Saint-Esprit doit d’abord nous révéler que l’âme est incapable d’accomplir quoi que ce soit des choses de Dieu, et qu’elle n’a aucune compréhension des choses spirituelles. Peu importe l’excellence et la force des parties de notre âme ; les choses de Dieu et les choses spirituelles lui restent inaccessibles et incompréhensibles. L’intelligence la plus vive, les émotions les plus équilibrées et la volonté la plus ferme ne peuvent jamais nous rendre spirituels. Voilà la première chose que nous devons demander à Dieu de nous révéler.
La seconde révélation que nous devons demander à l’Esprit Saint, c’est de nous faire comprendre que notre âme que que nous aimons tant, et tout ce qui y est lié, a déjà été crucifiée sur la croix, avec Christ.
Dans Gal 2,20, lorsque Paul écrit : « Je suis crucifié avec Christ… » le pronom personnel « Je », ce n’est pas son corps, ce n’est pas non plus son esprit : c’est son âme. Aux yeux de Dieu, à cause de la nature pécheresse que nous avons tous héritée d’Adam, l’âme n’est bonne que pour la mort. En fait, Dieu s’en est déjà occupé au travers de la croix de Christ. Il est donc inutile de chérir les choses de notre âme. Nous devons plutôt admettre qu’elle doit mourir, qu’elle mérite la mort, et que, en fait, elle est morte, comme notre vieille nature (Rm 6,6).
En effet, comme notre vieille nature, notre âme doit aussi passer par la croix de Christ. Mais comprenons bien : Elle doit mourir, non pas pour être détruite, mais pour être soumise à notre esprit. C’est ce qui se passait dans l’état où Adam se trouvait avant la chute.
L’âme est toujours là, avec ses dons naturels, mais la Croix doit faire passer ces dons naturels par la mort. La Croix doit mettre sur ces dons naturels la marque de la mort de Christ. Cette marque de la mort est sans cesse laissée sur l’âme pour l’amener à la place où elle restera toujours soumise à l’esprit ; pour l’amener à la place où elle ne s’affirmera jamais de manière indépendante; pour l’amener à la place où Dieu la voulait dès le commencement.
Dans toutes les choses divines, nous devons refuser la prééminence des trois parties de notre âme, et laisser l’esprit occuper la première place pour gouverner et diriger toutes nos actions. Le résultat sera le suivant : d’une part, nous pourrons utiliser toutes les parties de notre âme, oui, mais seulement au service de l’esprit ; d’autre part, nous ne vivrons pas par l’âme. Nous ne serons pas des chrétiens psychiques, mais des chrétiens spirituels.